The Sweet East, la conquête d’une Amérique contemporaine

The sweet east est un long métrage réalisé par le Directeur de la photographie Sean Price Williams. Il est présenté dans le cadre de la Quinzaine des cinéastes 2023 à Cannes.

La dislocation mentale, sociale et politique des États-Unis, filmée comme un jeu de marelle ou une variation d’Alice au pays des merveilles. La lycéenne Lillian fugue durant un voyage scolaire et, au fil de ses rencontres, traverse tout le prisme des radicalités et délires contemporains, des suprémacistes aux islamistes, en passant par des néo-punks ou des avant-gardistes woke. À chaque escale, des bulles où l’on parle beaucoup et tout seul, dans une parfaite ignorance des mondes voisins. Un récit à la croisée du conte, du récit picaresque et des films-ballades des années 70.


The sweet east, un récit Américain très attendu à la Quinzaine. Son réalisateur n’est autre que Sean Price Williams, le Directeur de la photographie de nombreux succès tels que Good Time. Le travail qu’il a pu fournir sur ses précédents films ne pouvait que nous donner hâte de le découvrir à la place de réalisateur. C’est avec son regard, qu’il dirige au premier rôle l’actrice Talia Ryder. Cette dernière n’est autre qu’excellente dans son jeu et semble avoir été taillée pour le rôle.

The Sweet East  ©D.R.

The sweet east n’a pas loupé les attentes qu’on lui conférait, bienvenue dans cette version moderne de Alice au pays des merveilles, qui démarre également avec une fugue, une entrée dans un miroir, mais renfermant un tout autre monde.

Nous nous retrouvons complètement happés par le périple de Lilliane, qui va migrer de secte en secte avec une sériosité surprenante. Une situation qui en devient comique pour nous public, de constater qu’elle ne tombera à aucun moment sur quelqu’un de nette, ou d’à peu près nette. Le scénario est généreux dans ses protagonistes et nous laisse le temps de les appréhender individuellement, et ainsi d’en saisir les idéologies, toujours douteuses. Un pur produit américain qui devrait plaire aux plus curieux, souhaitant se plonger un peu mieux dans le « rêve américain » (cauchemardesque). 

Sean Price Williams dépeint ici effectivement une Amérique de l’Est peuplée par la doctrine. Une Amérique de l’Est qui ne se prend plus au sérieux et tombe de plus en plus vers l’enchantement identitaire. Elle n’est plus une seule et même, elle se divise, mais se rassemble avec ce besoin d’appartenir à un groupe.

Un plaisir pour les yeux, esthétiquement très agréable, doux dans son grain et intime dans sa proximité avec la caméra. C’est marrant, divertissant et amusant le tout sur un propos de fond qui ne réside pas dans la subtilité mais dans la générosité. Sean Price Williams nous a proposé ici sa vision des bas fonds de l’Est des États Unis, et nous ne pouvons qu’aimer ça.


Charlotte Trivès
Charlotte Trivès
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