Voilà plus de 40 ans que le plus célèbre des archéologues s’est illustré pour la première fois sur le grand écran. Depuis, le personnage venu de l’imagination de Steven Spielberg et George Lucas s’est élevé comme icône ultime du cinéma d’aventure, faisant rêver moult génération, voir a carrément suscité une vocation chez les plus jeunes qui l’aurait découvert pendant sa grande période.
Grande période car bien que le troisième film, Indiana Jones et la dernière croisade (1989), était a l’origine imaginé par Spielberg pour dire au revoir à l’aventurier campé solidement par Harrison Ford, Hollywood ne l’a pas entendu de cette oreille et le papa de E.T et des dents de la mer a été rappelé en 2008 pour donner à son héro une nouvelle conclusion et, tant qu’à faire, un successeur.
Simplement, Indiana Jones et le crâne de cristal n’a pas convaincu, tout comme le duo Harrison Ford/Shia LaBeouf. Peut-être aurait-il mieux fallut laisser le docteur Jones partir avec son temps. Le coucher de soleil de fin de la dernière croisade s’y prêtent largement…
Sauf que la firme aux grandes oreilles et sa fâcheuse manie à déterrer les cadavres est passé par là entre temps, rachetant Lucas film et donc, au passage, les droits de la licence Indiana Jones. Difficile pour eux de ne pas saisir cette opportunité qu’ils imaginent forcément à haut potentiel lucratif en annonçant rapidement un cinquième film pour la franchise. Et si Steven Spielberg était initialement à la tête du projet, il a choisi de se retirer du poste de réalisateur pour laisser sa place à James Mangold. Indiana Jones 5 allait donc, en plus de revenir après un quatrième opus décevant, être le premier film de la saga à ne pas bénéficier du savoir faire de Spielberg à la réalisation. Autant dire que le projet pouvait difficilement faire pire dans la tête des fans…
Mais si l’on se penche sur la carrière de Mangold, on remarque que les mauvais films se font rares, voir simplement inexistant, et que les bons comme le remake de 3h10 pour Yuma (2007) ou les excellents comme Le Man 66 (2019) y côtoient Logan (2017) qui mettait déjà en scène un Wolverine vieillissant. Finalement, au vu de l’âge avancé d’Harrison Ford, et donc fatalement d’Indiana Jones, le projet est-il vraiment tombé entre de mauvaises mains ? Pas sûr…
Indiana Jones et le cadran de la destinée commence donc par une longue introduction (facilement 15 minutes) dans le passé, en 1945 plus précisément juste après la défaite de l’Allemagne nazie. Le professeur Jones et son collègue sont sur place dans le but de sauver des antiquités des mains des derniers fidèles d’Hitler. La présence d’un jeune Harrison Ford au cours de cette longue séquence a été rendue possible grâce au D-aging, technologie utilisée pour rajeunir numériquement les acteurs. Et si le résultat est globalement impressionnant ici (on pourrait croire que certaines scènes ont presque été capturées à l’époque du premier film.), la technologie laisse apparaître ses limites malgré une image volontairement sombre quand il s’agit de retranscrire des expressions de visage plus complexes ou de filmer de loin le personnage courir. Malgré ça, l’action filmée par James Mangold fait mouche, comme quand il filme un pont qui explose, tout comme le comique de mise en scène (un obus qui met un certain temps à exploser).
Mais c’est lorsque l’on retrouve le professeur Jones dans le présent (c’est-à-dire en 1969) que le propos du film se dévoile à nous sous forme de deux constats : Le premier, c’est qu’Indiana est définitivement vieux, et le fait qu’il nous apparaisse torse nu est là pour nous le montrer. Il ne sera pas question dans le film de camoufler son âge. Le temps a fait son œuvre, il n’est plus le jeune aventurier fougueux qu’il était. C’est comme ça, et il va falloir l’accepter. Le deuxième, c’est que le progrès technologique est en train d’éclipser pour de bons l’intérêt des gens pour notre passé. L’homme vient de marcher sur la lune, le monde entier a les yeux tournés vers l’espace. Ainsi, lorsque la filleule du professeur (excellemment interprétée par Phoebe Waller-Bridge) se présente à lui pour retrouver le cadran d’Archimède, comme elle le dit dans le film, c’est l’occasion pour lui de s’offrir un dernier tour de piste, une dernière aventure, un dernier triomphe. Une dernière aventure pour retrouver ce fameux cadran scindé en deux parties avant que les nazis ne mettent la main dessus. En effet, celui-ci a, pour faire simple, le pouvoir de faire voyager dans le temps, et on comprend assez bien pourquoi il serait dangereux s’il tombait entre de mauvaises mains. Et cette dernière aventure, James Mangold sait la filmer. Indiana Jones est vieux ? Rien ne l’empêche de conduire un tuk-tuk au Maroc, permettant de l’inclure dans une course poursuite effrénée, que là aussi James Mangold sait filmer, et qui constitue pour l’auteur de ces lignes la scène d’action la plus plaisante du film.
Et que serait un film Indiana Jones sans énigmes ? Ici portée sur la Grèce antique, c’est assez plaisant de les voir être résolus par le duo Harrison/ Phoebe qui fonctionne à merveille, les deux semblants être les deux faces d’une seule et même pièce.
Finalement, si Indiana Jones et le cadran de la destinée pouvait représenter un certain risque vis à vis de l’âge de son personnage, James Mangold arrive à en faire une belle révérence. Peut-être même la meilleure qu’il aurait pu avoir. Et s’il est vrai que le film semble être balisé par des passages considérés comme obligatoire par les studios, il n’en demeure pas moins que le réalisateur, en plus d’avoir a priori une réelle affection pour son personnage, reste un véritable faiseur. Qu’il parvient réellement à raconter quelque chose avec sa mise en scène, et qui y va jusqu’au bout. Même quand ce qu’il film semble casse-gueule au possible, il y crois. Notamment avec ce final vertigineux, encore plus poussée que le royaume du crâne de cristal, mais qui demeure lourd de sens. Indiana Jones aura donc bien eu le droit à son dernier triomphe. Et ce n’était pas gagné.
La Note
7/10